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Les volte-faces du destin

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.............................................................................................................. 18ème épisode

 

Fin août, Ginette, proposa à sa petite sœur, de l’héberger dans un studio meublé, qu’elle possédait dans le 18ème arrondissement. Ceci, dans l'attente d'un nouveau toit… Le petit appartement de Saint-Ouen, étant destiné à être vendu par adjudication et, l’automne et l’hiver, faisant partie des hôtes qui s’imposent et s’installent du jour au lendemain, Christiane et Juste, durent se résoudre à déménager au plus vite. Le destin y était pour quelque chose : Leur poêle fonctionnant au gaz, il était désormais impossible pour eux de se chauffer car, je le rappelle, les pompiers avaient écrasé les conduites d'arrivée de gaz. C’est avec joie et reconnaissance, qu’elle avait accepté l’offre de sa sœur. Après avoir retiré le nécessaire - hormis les meubles - du 97, rue des Rosiers, le jeune couple emménagea dans ledit studio qui était « trop sympa ». Rien à voir avec St-Ouen !! Christiane se réjouit de recouvrer le quartier de son enfance. La rue du Poteau où se trouvait le marché où chaque dimanche matin, elle faisait les courses pour toute la famille. La rue Belliard, berceau se son enfance, la rue du Ruisseau, l’Eglise Sainte-Hélène, rue Championnet, là-même où elle avait été baptisée et avait fait toutes ses communions, la rue Ordener, la rue Bergot où demeurait jadis, sa grand-mère… Et son collège, rue des Poissonniers, tout près de la Butte Montmartre, où elle avait étudié et fait les quatre cents coups. Un quartier dit populaire, aux alentours duquel grouillaient toutes sortes de gens aux valeurs simples et, atypiques. Les odeurs, particulièrement riches et variées, lui remontaient aux narines. Les cris et les pleurs des mômes, si perceptibles les soirs d'été, les petits bars arabes qu’elle aimait tant et puis, cette chaleur humaine que l’on ne trouvait nulle part ailleurs ; et qui lui avait tant fait défaut ! Comment avait-elle pu vivre éloignée de tout cela !

 

En ce début de septembre 1977, l’Eté s'éternisait et l'air ambiant semblait aussi lourd que lors des mois de juillet et août. En quittant St-Ouen, Christiane, s’était promis de tirer un trait définitif sur une part de son passé : Patrick, Didier et Francesca. Surtout avec Francesca - qui lui en voulait à mort - au point de l’avoir incriminée comme si elle avait été la seule fautive ; La seule à être responsable de son courroux ! « L’homme propose » elle aurait dû s’en rappeler ! Son ex-meilleure amie, nourrissait un tel degré de haine à son endroit, qu’elle la dénigrait ouvertement et, s’il lui arrivait de la croiser dans rue, elle faisait mine de ne pas la voir. Faut pas pousser, pensait Christiane. Je n’ai pas commis un crime… Et puis, Didier, est en grande partie coupable ; et, entre nous soit dit, quel homme est assez vertueux, pour que l’on se brouille avec sa meilleure amie… ? Dites-moi pourquoi les femmes doivent toujours porter le chapeau !! Hélas, Francesca, d’origine sicilienne du côté paternel, avait pris le partie d’honorer les coutumes de là-bas : la vengeance !! Qui est d’ailleurs mauvaise conseillère ! Il était donc nécessaire qu'elle tournât la page.

 

Curieusement, de venir habiter dans le 18ème arrondissement de Paris, avait rapproché Christiane de sa sœur. Gigi venait fréquemment les voir ; surtout en fins de semaines. Juste, avait plus ou moins accepté d’héberger – avec l’accord de Christiane - un de ses copains, appelé « Gaby » - un garçon adorable, respectueux et poli que sa soeur, avait pris en sympathie. Tous les quatre, bras dessus et bras dessous, allaient dîner dans les nombreux restaurants de la rue Caulaincourt et après avoir festoyé, ils attrapaient le premier taxi venu qui démarrait en direction du « Balajo », rue de Lape. Entre chaque spectacles de travestis, ils se déchaînaient sur la piste, jusqu’à l’heure de la fermeture. Bien sûr, c’est Ginette qui régalait… Christiane, bien que toujours adpte du  "faire vomir" paraissait plus épanouie.  

 

A vingt-sept ans, elle n’était pas réellement belle. Plutôt jolie et attirante. En dépit de sa petite taille, elle était admirablement proportionnée et, comme les hommes le disent communément, « elle avait ce qu’il fallait où il fallait ! ». Sa plastique était parfaite et, son grain de peau, satiné et lumineux. Le galbe de son cou et de ses épaules pouvaient faire penser à une statue de Rodin. Ses jambes, très effilées, la  grandissaient. Son visage aux traits pleins et enfantins, était rehaussé d’une chevelure auburn, lâchée sur la nuque, ou relevée en chignon ; ce qui laissait entrevoir un cou gracile et une peau de pèche. Mon absolu, savait se contenter de ce que Dieu lui avait donné. Suivant sa morphologie, elle avait l’art et la manière de se mettre en valeur. Et elle le savait !! Tiens, je me souviens d'une anecdote assez cocasse : dans la station de métro « Simplon » qu’elle prenait chaque matin pour se rendre à la Défense, un jeune homme la croisant, visiblement subjugué par son charme, se retourna et, n'arrivant pas à détacher ses yeux de sa silhouette, se prit un poteau en plein visage. C’est la guichetière, en rigolant de bon cœur, qui lui avait rapporté la scène. Pour tous ceux qui côtoyaient la jeune femme, elle respirait la joie de vivre et la santé. Tous, hommes et femmes, étaient loin d'imaginer ses drames familiaux et quels étaient ses maux.

 

Beaucoup, en apercevant Christiane, la comparait à un mannequin en miniature ; une sorte de poupée Barbie un peu moins surfaite et moins apprêtée. Elle ne provoquait pas les aventures amoureuses. Sans le vouloir, elle captivait certains et en ensorcelait d’autres. De son apparence, lumineuse, il transperçait une belle aura. En outre, sa grâce naturelle et sa spontanéité, enjôlaient les jeunes comme les vieux. Toutefois, à cette époque, il n’était pas concevable qu’une fille fît des avances à un garçon ; ce qui était condamnable. Une femme devait se laisser désirer et conquérir, en s’abstenant d’allumer le feu. Une façon de faire qui était réservée aux prostituées !! Par ailleurs, ce goût irrépressible qu'elle avait pour la danse, l'alcool et le besoin de brûler la chandelle par le deux bouts, palpitait dans ses gênes. Christiane, partout où elle passait, mettait de l'ambiance. Elle surprenait, intriguait et dérangeait. Mademoiselle, avait sa cour et ce phénomène; défrisait la gente féminine.

 

Mon Essentiel s'était lié d'amitié avec une collègue qui lui ressemblait : «Mona». Dans le sens que chacune à sa manière aimaient choquer et séduire. Mona était fana de Marylin Monroe, dont elle se glorifiait de ressembler. Son physique de blonde platine, faisait jaser à tous les étages. Très maquillée, elle jouait de ses lèvres pulpeuses ainsi que de sa poitrine généreuse, toujours moulée dans des pulls style années cinquante. Ses jupes droites, étroites et fendues derrière, épousaient à merveille ses fesses rebondies, qu’elle dandinait en marchant d’un pas incertain, puisqu'elle était toujours perchée sur de très hauts talons. Une des règles de la physiologie qu’elle ne maîtrisait pas forcément. Ainsi harnachée de tout son cliquant, elle s’amusait follement  du regard des autres. Mona, adorait jouer les ingénues, en battant des cils et en se déhanchant au maximum. Dans l’ensemble, elle était plutôt attirante et extrêmement sexy. Ce qui attisait les mauvaises langues ; surtout celles des femmes ! Vulgaires, mauvais genre, inconvenante… et je tiens à rester polie ! Tous les adjectifs les plus vils du dictionnaire, ne cessaient de la dépeindre comme une fille facile. Et ce, sans se poser cette question : qui se cache sous cette Marilyn de pacotille ?? Toujours cette fameuse étiquette indélébile… Pourtant, – je peux en témoigner - comme amie, elle était sincère, serviable et si attachante ! Christiane ne l'oubliera jamais.

 

C’est elle, qui lui présenta Gérard, un type qui était cadre dans une société partenaire de la Holding. Ma préférence à moi, le soir-même, en tomba dingue amoureuse. Un cœur d’artichaut ? Probablement. Entre l’amour vrai et l’attirance charnelle, ses neurones s'entrechoquaient. Or, pour apprendre les rudiments de la vie et connaître les hommes, ne faut-il pas auparavant se faire les dents telle une jeune louve ? Bien sûr… parfois à ses dépens ! Gérard, un homme de quinze ans son ainé, était divorcé et collectionnait les conquêtes féminines. Christiane, aveuglée par l'intensité de l'appel des sens et, infiniment crédule, se laissa piétiner le cœur. Don Juan était un névrosé cruel et pervers qui se délectait de la souffrance des femmes. Celui-ci, pourvu d’un pouvoir de séduction redoutable, prenait plaisir torturer et humilier. Pour seul défense, ses victimes, n'avaient que leurs yeux pour pleurer. Les vendredis soirs, rendez-vous oblige, Christiane, rejoignait le studio au petit matin, le corps encore vibrant des caresses de son amant. Et vint le jour où elle découcha. Penaude et honteuse, elle se pointa vers midi, en inventa une excuse. Juste, son compagnon, au comble de l'inquiétude, avait ameuté  Ginette et son docteur, qui piétinaient sur place. La belle simula l'étonée en appuyant sur le fait, qu'il n'y avait pas de quoi fouetter un chat. Finalement, c'est la dignité, qui mit K.O. cette amour destructeur. Par sa seule volonté, elle mit fin à cette romance, qui lui rongeait le coeur.

 

Tout va, tout s'en va. Tout passe, tout lasse, tout casse. La leçon fut longue à accepter. Elle était tout à ses tourments, lorsqu'elle apprit que son employeur souscrivait au « un pour cent patronale ». Renseignements pris, elle sollicita un rendez-vous auprès l’Assistante Sociale de l’Entreprise, qui la reçut avec beaucoup de compréhension. Christiane, conformément à sa demande, lui soumis de A à Z et dans tous ses détails, les années de déboires subis à Saint-Ouen. L’entrée délabrée, la crasse et la vétusté de l’immeuble, les privations d’eau, l’incendie, les pompiers, etc. Son histoire terminée, elle ravala sa salive et se racla la gorge. Après s'être accordé quelques minutes de réflexion, Mme… lui suggéra de l'accompagner sur les lieux, jusqu’à St-Ouen, afin de confirmer ses dires par écrit. Arrivées sur place, ce que vit la pauvre femme, lui sembla irréaliste. Elle resta sans voix. C'est en s'indignant qu’elle prit acte de l’état des lieux - appartement compris- et que hors d’elle, elle souligna en rouge : scandaleux et dégradant de laisser croupir un être humain, dans une telle porcherie ! Une fois dehors, elle promit à Christiane, de bouger ciel et terre, pour qu'elle soit prioritaire dans l'attribution d'un appartement décent !! Car, insista-t-elle "- ma pauvre enfant - je dois vous sortir de là !"

 

 Quelques mois s'écoulèrent. Le calme plat. Jusqu'au jour où Christiane, fut convoquée dans le bureau de Madame… qui sitôt qu'elle l'aperçut, lui prit la main et, avec un large sourire aux lèvres, lui annonça qu'un appartement était en passe de se libérer. Il était situé dans le 16ème arrondissement. Entre la Porte Saint-Cloud et la Porte d'Auteuil. La station de métro la plus proche se trouvait au niveau du boulevard Exelmans Les mots sont insuffisants pour vous décrire la joie et le soulagement que Christiane éprouva en ces instants. Spontanément, elle se jeta au cou de sa bienfaitrice et l'embrassa sur les joues. Le lendemain, elle lui fit envoyer une gerbe de fleurs. C’était la moindre des choses… Le scoop fit la « Une » dans toute la boîte. Alors qu'elle n'y était pour rien, du jour au lendemain, elle devint la cible à abattre. Les regards en coin n'étaient pas tendres. Mais... C'était peut-être le prix à payer...?  

 

Sa destinée, une fois n'était pas coutume, l’avait privilégiée.

Et c'était l’essentiel !

 

A bientôt, mes chers blogueurs !
........................................................................................................ A suivre

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