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L'emprise de l'alcool

 

 

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………………………………………………………………………………… 26ème épisode

 

Giselle s’était adaptée à son nouveau métier. Comme elle l’affirmait « Quand on a chuté jusqu’à moins zéro, on s’habitue à tout ! » Les locataires de l’immeuble dont elle s’occupait n’avaient qu’à se louer de ses bons et loyaux services. En ces temps d’alors, encore glorieux, les gardiens d’immeubles ne rechignaient pas à la tâche. Giselle, en tant que concierge d'un immeuble, recevait et distribuait le courrier, rentrait et sortait les poubelles, nettoyait les vitres, les escaliers et les paliers de chaque étage, s’occupait des problèmes d’intendance et rendait de menus services, aux uns et aux autres. Elle s’efforçait de cacher ses démons intérieurs, en gardant le sourire, quoi qu’il pût arriver!

 

Je pense utile de souligner que Giselle, en tant qu’ex-comptable, possédait un petit plus par rapport à beaucoup de ses collègues. Celle-ci, possédait un acquis solide en termes d’instruction et connaissait parfaitement les spécificités de la langue française. Elle était capable de conseiller, d’inciter, de préconiser, tout en sachant se montrer flexible et diplomate. Par contre, un mystère restait en suspension. Nul ne savait quelle discipline de fer lui apportait assez de potentiel, pour allier obligations professionnelles et abus d’alcool ! Un fait était certain, c’est qu’elle était aimée et estimée de tous. Ce qui d’ailleurs, se vérifiait en fin d’année lors de ses étrennes, qui étaient très honorables ! Giselle, petit à petit, se refaisait une santé.

 

Un dimanche matin, Christiane fut tirée de son sommeil, par la sonnerie du téléphone. Vasouillarde, elle s’obligea à s'extirper de son lit en se traînant jusqu’à l’entrée, pour décrocher. Un des locataires, catastrophés, l’avertissait que sa mère gisait de tout son long et à même le sol, entre la cuisine et la pièce de la loge. La loge étant fermée le dimanche, il lui précisa que d'après ce qu’il distinguait au travers de la porte vitrée, sa mère paraissait inerte. Branle-bas de combat ! Christiane, extrapolant déjà et n’osant surtout pas envisager les ravages d’une attaque cérébrale, n’eût qu’un seul recours : PIERRE. Qu’elle appela immédiatement. Dieu merci… il n’était pas de garde ! Une chance ! Il était l'homme, le confident et l'ami sur lequel elle pouvait toujours compter, en tout moment et toute circonstance. Il fut chez elle en moins de dix minutes. Mon essentiel, s’attendant au pire, se jeta dans ses bras réconfortant, en pleurant « Allons, Chris… calme-toi, mon petit chou ! Ne t’affole-pas ! Ce n’est peut-être rien ! ». Il lui tapota gentiment la joue, en signe de réconfort. Après tout, il avait peut-être raison… Rassérénée, elle sécha ses larmes.

 

Une fois sur les lieux, Christiane, joignit les urgences de l’hôpital le plus proche. Si j’ai bonne mémoire, c’était Lariboisière… Pendant ce temps, Pierre, bricolait la serrure de la loge qui finit par céder. Giselle, respirait. Les traits détendus et presque sereins… Très vite, deux infirmiers munis d’un brancard, se chargèrent de la malade, qu'ils transportèrent dans l’ambulance. Et en route… Christiane et Pierre suivaient en voiture. Arrivés aux urgences, le brancard fut sortie de l’ambulance jusqu’aux consultations. Ensuite, les infirmiers se saisirent d’un charriot, sur lequel ils allongèrent la patiente, en la recouvrant d’une couverture.

 

Gisèle reprenait peu à peu ses esprits. Christiane, la voyant ouvrir les yeux, entreprit de l’interroger sur les circonstances de son malaise. Or, elle affirmait ne rien se souvenir. Le trou noir. Dans la mesure où nous étions dimanche matin, le lendemain d’une soirée bien arrosées, les infirmiers et les internes, étaient débordés. Christiane et Pierre, durent prendre leur mal en patience, avant que l’on s’occupe sérieusement de la malade. Tous deux étaient assis dans le hall d’entrée. Jean parcourait un magazine et Christiane, laissait vagabonder ses pensées. Enfin, elle aperçut un médecin qui venait à sa rencontre. Il arborait un large sourire. Arrivé à sa hauteur, il se présenta. A son tour, elle fit les présentations. «Alors, Docteur ? » S’empressa de demander Christiane, très préoccupée. « Rien de grave, Mademoiselle ; rassurez-vous ! Votre mère va très bien ! » Mon Essentiel, le regard accroché à celui du médecin, insista lourdement « Docteur… pardonnez mon insistance, mais maman, a perdu connaissance ; ce qui n’est pas rien !».

 

« Vous avez un moment à m’accorder ? » lui demanda le médecin, en guise d’explication. «Bien sûr, docteur ! » -Dans ce cas, suivez-moi ! Elle lui emboîta le pas et le suivit jusqu’au bout d’un large couloir où se trouvait son bureau. Par soucis de discrétion, il prit soin de refermer la porte derrière lui « Je vous en prie, asseyez-vous ! » Il s’assied à son tour. Réellement embarrassé, il s’attarda quelques secondes sur le visage de la jeune femme et commença à parler. « Puis-je vous poser une question indiscrète… ? – Je vous en prie ! « Votre maman s’adonne-t-elle souvent à l’alcool ? » Christiane fit celle qui tombait des nues. Le regard fixé sur le médecin, elle l’engagea à continuer. « He bien, au vu de la quantité d’alcool absorbée, je pense que votre maman a dû sombrer dans un sommeil si profond, qu’elle aura vraisemblablement effleuré le coma éthylique ! » Christiane changea de couleur. Ne pouvant contenir ses larmes, elle se contentait de regarder le médecin, avec des yeux de bête traquée. Un sentiment de sourde colère, dirigée contre sa mère, la submergea « Veuillez m’excuser, Docteur, c’est l’émotion ! » Je comprends, prenez votre temps ! Christiane se moucha bruyamment. « A-t-elle déjà suivi une cure de désintoxication ? » Poursuivit le médecin. Christiane, lui renvoya un regard vide. « Pour ça, Docteur, faudrait-il que ma mère admette son alcoolisme ! "

 

Le regard toujours attaché au médecin, Christiane, hésitait à tout lui révéler. Après tout, il était lié par le secret médical. C’était comme si elle se serait confiée à un prêtre ! « C’est une longue histoire, Docteur ! ». Il lui fit un sourire encourageant. « Allez-y, je vous écoute ! ». Toutes les fois où j’ai invité ma mère chez moi, elle est arrivée titubante et l’haleine chargée d’alcool. Bien sûr, je lui reprochais mais, enfermée dans un déni stupide, elle s’escrimait toujours à nier l’évidence. Hélas, je me heurtais sans cesse, à la même réponse. Non… elle n’avait rien bu ! Elle lui parla également de son passé. L’achat du Café, sa descente au-delà de la médiocrité, la mort de Bernard, son compagnon et tout ce qui s’en était suivi. Lorsqu’elle eut fini, elle aspira profondément. « Voilà Docteur. Vous savez tout ! ». Les traits devenus hermétiques, le médecin, sans faire de commentaires, sortit une carte de visite d’un tiroir, qu’il lui tendit. « Ce sont les coordonnées d’un Centre de Désintoxication, situé à Meudon » lui précisa-t-il. «Et, cela n’engage à rien ! » rajouta-t-il. Sur ce, il se leva, l’accompagna jusqu’à la porte et lui serra la main. « Bon courage, Mademoiselle ! » – Merci Docteur !

 

 Giselle, attendait sa fille, assise dans le couloir. « On y va maman… » Christiane, dût la soutenir pour la diriger jusqu’à la sortie, devant laquelle Pierre attendait. Elle lui chuchota à l’oreille, un « je t’expliquerai plus tard ! » Tous les trois rejoignirent directement le véhicule de son ami, qui démarra en direction du 16° arrondissement.

 

Trois mois s’écoulèrent durant lesquels Gisèle s’arrangea pour se montrer abstinente. Christiane, lui avait passé un sacré savon, en lui assurant qu’elle aurait pu y rester ! Elle lui avait mis en évidence les coups bas de son passé et ses revirements de situation. Afin de déclencher – autant faire se peut – une prise de conscience de sa part, elle l’avait engagée à contrer un éventuel risque de licenciement, ainsi que les possibles dangers de crises d’hémiplégie qui pouvaient survenir n’importe quand et, la rendre paralytique. Cette maladie, dans la famille, était héréditaire. Sa mère, la grand-mère de Christiane, était restée paralysée d’un bras et d’une jambe, pendant des années. Après quatre autres crises qui la transformèrent en légume pendant de longs mois, elle fut soudain terrassée par la septième attaque, qui lui fut fatale.

 

La source de toutes mes joies, ne sut jamais ce qui décida Gisèle, à suivre une cure de désintoxication. La peur ?? De son propre chef, elle contacta le centre de Meudon, afin de prendre rendez-vous.

 

Et puis, Meudon… c’était à proximité du 16° !

 

…………………………………………………………………… A suivre

 

A demain, les blogueurs

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